Auteur/autrice : François MILLO

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FOIX et son imprenable forteresse

Enchâssée dans l’écrin pyrénéen, la petite cité de Foix palpite au pied de son château fort du XIIème siècle.
L’imposante silhouette féodale domine la ville qui était au cœur de l’Ariège au Moyen âge.

Perchées sur leurs rochers, les trois tours et l’impressionnante muraille médiévale demeurent un symbole très fort pour les habitants qui appellent inquiets, les employés du château quand plongées dans le brouillard, elles disparaissent de leur horizon. C’est comme si on leur arrachait une montagne, s’amuse sa conservatrice, avant de conclure : « c’est vrai qu’il a quelque chose de rassurant même si pendant plus de 2 siècles il a eu mauvaise réputation ». Foix a servi de garnison et de prison, et a vu pousser des bâtiments pour héberger les prisonniers.
Reste que les Fuxéens sont viscéralement attachés à cette forteresse imprenable : « El castels es tan fortz qu’el mezis se defent » « le château est si fort qu’il se défend par lui-même » disait-on au Moyen Age. Voici le berceau de la famille du Comté de Foix, qui marquera quelque pages d’histoire de France avec ses enfants prodiges, Henri IV et Gaston III de Foix-Béarn plus connu sous le nom de Gaston Fébus.

« le château est si fort qu’il se défend par lui-même » disait-on au Moyen Age.
L’édifice actuel a fait l’objet d’un immense chantier de rénovation, mais il n’a pas été détruit comme Montségur dont il fallait éradiquer tout souvenir de résistance. Au vide abyssal de l’un répond le trop plein de l’autre. Un parti pris étonnant en France : tout le mobilier intérieur a été reconstitué, celui d’origine peut se découvrir en partie au musée.
Résultat, au château, tout est à disposition des visiteurs, sièges, tables, lits, armes, armures, et autres objets de la vie quotidienne y compris les casques, et les cottes de mailles. Une aubaine pour les amateurs qui peuvent toucher, tester le confort des sièges, soupeser et même enfiler une vraie cotte de mailles, ou porter un casque. C’est aussi l’occasion de découvrir qu’au Moyen-âge les meubles n’étaient pas patinés.

Tout a été réalisé sur mesure, le fruit d’un long travail d’archivistes et d’inventaires des différentes collections médiévales répertoriées. On a également respecté les bois d’origine, le chêne et le châtaignier. Force est de reconnaitre que cette scénographie qui irritera sans doute les puristes, ravit tous les touristes qui ont envie de se prendre pour Gaston Fébus, et nous rappelle qu’à l’époque le mobilier était aussi neuf !

Ces reconstitutions y compris celle de l’imposante cage à écureuil, (sorte de grue médiévale,) dans une des cours, permet d’ appréhender l’ ingénierie médiévale, et d’en comprendre le fonctionnement puisqu’elle tourne trois fois par jour. On salue cet aspect de l’histoire du Moyen Age qui passe souvent à la trappe. Et ce d’autant plus qu’elle est unique à fonctionner ainsi en Europe.

Ne ratez pas la grande salle d’apparat, la chambre du comte, le scriptorium, le cachot et n’oubliez pas de grimper au sommet de la tour ronde, l’une des deux tours accessibles au public. Ses escaliers distribuent au passage de superbes pièces voutées. La grimpette se mérite car les marches inégales coupent le souffle, mais on est récompensé à l’arrivée, l’horizon se respire à plein poumon.

De nombreux ateliers participatifs et ludiques vous sont proposés pour apprendre le maniement de l’arbalète et autres armes de guerre, vous pourrez aussi apprendre à tailler la pierre ou les rudiments de la forge.

Dès cet été « les apéros chez Gaston » permettront de jouer les prolongations en arrosant la visite de vins médiévaux dans la salle des banquets…
A Boire !

Il est prudent de réserver.
La billetterie sera en ligne dès juillet. Des soirées Cluedo sont également prévues tout l’été.

Texte: Anne Sarbel
Photos: François Millo

 

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NOËL et les 13 desserts en Provence

Ancienne et forte tradition en Provence, les 13 desserts font partie du rituel de Noël qui se déroule au sein même des familles.
Mais d’ou vient cette tradition à laquelle les provençaux tiennent beaucoup ?

Et qu’y a t il en fin de repas sur la table de Noël ?

En Provence, le Noël traditionnel commence dans les familles le 4 décembre avec la fête de la Sainte Barbe. Dès cette date, les provençaux installent la crèche.

Augures des grains de blé et des lentilles
C’est aussi le moment de faire germer quelques grains de blé ou lentilles dans des soucoupes dont le fond est tapissé de mousse ou de coton, humectés régulièrement. Le
25 Décembre, si les grains ont donné de beaux germes, la récolte de l’année sera bonne, sinon on fera disette. De nos jours, une bonne germination est un signe de chance et de réussite pour l’année à venir. Quoi qu’il en soit, le blé germé doit figurer sur la table de Noël.

Le gros soupé, les trois nappes et les 13 desserts
La nuit de Noël est marquée par deux évènements majeurs : la messe de minuit et le « gros soupé » terminé par les 13 desserts.
En principe le repas est pris au retour de la messe, mais il arrive aussi qu’on le commence avant et qu’on s’interrompe avant les desserts pour aller à la messe. L’essentiel en Provence est de faire un beau souper : c’est un repas maigre, c’est à dire sans viande, ce qui n’exclue ni l’abondance ni la qualité.
La tradition ne fixe pas la composition du souper, mais un minimum de sept plats est toutefois requis, référence aux sept plaies du Christ. Cette même tradition est en revanche très précise sur l’agencement de la table : en particulier, on la recouvre de trois nappes blanches représentant la trinité, et l’on y dispose trois cierges, le blé de la Sainte Barbe, un gros pain et douze petits, ainsi qu’en fin de repas, les fameux 13 desserts. Il arrive que l’on prévoit une place à table et une part de plus, «la part du pauvre», pour le cas où une personne démunie frapperait à la porte. Le « gros soupé » et les desserts qui portaient alors le nom de «calenos», ont sûrement une origine très ancienne.
Les desserts ont de tous temps été abondants, reflétant l’aisance des familles, mais ce n’est qu’au début du XXème siècle qu’ils sont présentés au nombre de 13, en référence à la cène.

Aujourd’hui, la tradition des 13 desserts perdure dans nombre de familles provençales. Ce nombre 13 peut toutefois n’être qu’un nombre minimal, les gourmands étant légion lors des fêtes de Noël… Tout le monde s’accorde cependant sur une liste de huit incontournables, sorte de « tronc commun » qui assure un lien de tradition d’une famille à l’autre.

Les «mendiants» :
Parmi eux, figure le groupe des « mendiants »: chacun d’eux est censé évoquer un ordre monastique. Les amandes pour l’ordre des Carmes, les figues pour celui des Franciscains, les raisins pour celui des Dominicains, et enfin les noix et les noisettes pour celui des Augustins.

La pompe à l’huile : cette spécialité très provençale est un pain brioché plat, fait à l’huile d’olives, généralement parfumé à la fleur d’oranger et parfois à l’anis. On ne la coupe pas, on la rompt comme fît Jésus avec le pain de son dernier repas.

Les nougats : le blanc qui symbolise le bien et le noir qui symbolise le mal.

Les dattes apportent une touche d’exotisme : elles rappelle que le Christ est venu d’orient et évoquent les rois mages. Elles sont parfois farcies de pâte d’amande.

En plus de ces huit desserts de base et incontournables, chaque famille est libre de compléter à treize la composition, selon ses goûts, mais en restant dans un certain style Provence. On pourra par exemple placer sur la table les navettes de Marseille, sorte de biscuits parfumés à l’anis, les calissons d’Aix, des fruits confits, des
pruneaux, ou encore des fruits de saison : oranges, mandarines, pommes, poires, raisin…
Aujourd’hui, la gourmandise, l’imagination et le sens de la fête conduisent à accompagner les 13 desserts traditionnels, d’autres desserts qui, s’ils n’ont rien à voir avec
la tradition, n’en sont pas moins délicieux.
Les ressources de la cuisine étant inépuisables, il serait vain d’en dresser une liste. Peu importe, les 13 desserts et ceux qui viennent s’y ajouter apportent une vraie note de
douceur pour la nuit de Noël et pour les jours suivants. Car chaque jour suivant Noël, on retire successivement une nappe de la table et il est de tradition que les treize desserts et leurs compagnons surnuméraires éventuels, restent en place pendant ces trois jours afin que toutes les personnes présentes dans la maison puissent y goûter.

Il revient ainsi à ces douceurs de prolonger les joies de Noël.

Texte et Photo : François Millo

Recette de la Pompe à l’Huile
Ingrédients :
– 250 g. de farine de blé
– 60 g. de sucre fin
– 10 g. de levure de boulanger
– 2 œufs
– 8 Cuillères à soupe d’huile d’olive
– un verre de lait
– Fleur d’oranger, zeste d’orange, zeste de citron à convenance
Préparation :
– Emietter et délayer la levure dans un demi verre d’eau tiède : ajouter de la farine et faire un pâton bien mou. Filmer et laisser lever à température ambiante.
– Verser la farine dans un saladier, saler et mélanger. Dans un trou fait au centre, ajouter les œufs un peu battus, le sucre, l’huile d’olive, l’eau de fleur d’oranger et les zestes selon votre goût.
– Mélanger doucement ces ingrédients en partant du centre, puis incorporer le levain. Pétrir jusqu’à obtenir une pâte homogène en boule. Filmer et laisser reposer pendant plusieurs heures à température ambiante, la pâte doit doubler de volume. Placer ensuite la pâte au réfrigérateur pendant une nuit.
– Le lendemain, étaler la pâte pour lui donner une épaisseur de 1 à 2 cm. La forme est à votre convenance : si une seule pompe est trop grande pour votre four, vous pouvez séparer en deux ou plusieurs pompes. Leur forme est généralement ronde ou ovale. Inciser en surface, en forme d’étoile, et laisser reposer une heure.
– Préchauffer four à 180, badigeonner la surface de la pompe avec le lait, et enfourner pour une cuisson d’environ 25 minutes, la surface devient dorée. Retirer du four, badigeonner cette surface avec de l’huile d’olive.
La pompe à l’huile se consomme tiède.

Journalistes

Le Citron de Menton

Il est jaune-vert, un peu gros et souvent biscornu, il peut se conserver en restant sur l’arbre et être cueilli à la demande, sa peau s’épaissit avec le temps, mais elle est comestible, il est plus sucré et moins acide que les autres, il a sa fête traditionnelle en hiver… Un drôle de citron que celui de Menton, mais quel goût !

Luisa est intarissable sur le sujet ! La cinquantaine juste passée, cette piémontaise d’origine a quitté son Italie natale il y a cinq ans pour créer avec son fils au centre de Menton sa boutique-atelier de traiteur «pasta piemonte». Elle bénéficie aujourd’hui de la première certification BIO de ce genre dans les Alpes Maritimes.
En arrivant, elle redécouvre le citron local, dont la renommée avait quand même franchi la frontière, et s’enthousiasme : «j’ai immédiatement vu qu’il serait possible d’allier la riccotta avec le citron de Menton. Sa faible acidité permet en premier lieu de réaliser avec le fromage un mélange stable. Mais surtout, avec la vivacité d’un côte et la rondeur de l’autre, les arômes et les saveurs entrent en harmonie !». Tout en développant sa boutique de pâtes fraîches, Luisa crée la recette du «ravioli au citron de Menton», recette dont elle est désormais propriétaire.

Mais l’agrume mentonnaise inspire aussi nombre de sites gourmands. Des boutiques spécialisées telles «la Maison du Citron», installée à Menton bien sûr mais aussi à Cannes et Lyon,elles offrent un éventail de créations au citron de Menton : tapenades, moutarde, vinaigre, huile d’olive, et du côté des patisseries : tartes au citron, crèmes, pâte de fruit, jusqu’au chocolat fourré au citron.

Les restaurateurs, qu’ils soient de renom ou pas, ont également bien intégré les atouts du citron de Menton : une façon pour eux de réveiller certains plats, tout en utilisant un produit très local, le plus souvent cultivé en bio. Petit moment de convivialité en fin de repas, nombre d’entre eux offrent le Limoncello, liqueur traditionnelle d’origine italienne, mais faite à Menton avec le citron du cru.

Mais en fait, qui est il ce citron?

Il faut escalader les pentes raides qui dominent la mer au dessus du village pour le rencontrer sur son terroir. Car on peut désormais parler de terroir : le citron de Menton bénéficie depuis 2015 d’une Indication d’Origine Protégée (IGP), norme de qualité européenne qui reconnait son origine et sa qualité. On le cultive là depuis le 15ème siècle : trois siècles plus tard l’activité atteint son apogée avant que s’amorce un déclin régulier aggravé par l’absence de port, l’essor du tourisme et surtout le gel de 1956. Mais depuis une vingtaine d’années, sous l’impulsion d’une quinzaine d’agrumiculteurs passionnés, la culture du Citron de Menton est en plein essor et atteint aujourd’hui les 200 tonnes.

Le milieu naturel très montagneux, la taille des parcelles et leur accès particulièrement difficile empêchent toute mécanisation. D’une façon obligatoire, la culture est ici traditionnelle, sur des restanques et majoritairement en agriculture biologique. Le Citron de Menton n’a d’autre choix que d’être authentique.
Le Citron de Menton a une bonne résistance au froid. Menton, qui bénéficie d’un climat particulièrement doux, tempéré par la proximité de la mer, est cependant la zone de production la plus septentrionale pour cet agrume. Les recherches menées dans le cadre de l’I.N.R.A. montrent que «cette variété est riche en acides et en essences. Sa peau a une forte teneur en huiles essentielles».

C’est un «quatre saisons» avec une floraison importante au printemps qui se prolonge jusqu’à l’automne. Une particularité : on peut trouver sur un même arbre, des fleurs, des fruits verts et des fruits mûrs ! Un solide atout : le fruit peut se conserver sur l’arbre pendant plus de huit mois !

Laurent Gannaz, (La Maison du Citron), qui cultive ses 350 citronniers au dessus de Menton confirme: «Le citron de Menton murit en Janvier, mais nous le laissons sur l’arbre car il grossit peu à peu. Sa peau s’épaissit, se charge d’arômes, d’huiles essentielles, et la pulpe devient moins acide et plus sucrée. C’est une sorte d’affinage naturel très particulier à cette variété, et l’on peut d’ailleurs consommer autant la pulpe que la peau du Citron de Menton. C’est bénéfique car les principes actifs se concentrent dans la peau et c’est bon car il n’y a pas d’amertume dans la partie épaisse et blanche de la peau, qui s’adoucit avec le temps».

A Menton, le citron a sa fête : la ville a eu son carnaval dès 1876, mais le nom de fête du Citron apparait seulement en 1934 lorsque cette fête populaire a été résolument dédiée au citron. Depuis, elle se tient chaque année début mars avec en particulier un défilé de chars entièrement décorés de citrons et d’oranges.

Le terroir, la variété, le savoir-faire des cultivateurs, qui ont conduit à la reconnaissance en IGP, assurent certainement le développement du Citron de Menton. L’intérêt indéniable des restaurateurs et des gourmets vient confirmer que cette étonnante agrume locale est promise à un bel avenir.

François Millo